L’épicentre de la Commune est un hameau nommé Grand’Cour. On vous raconte les origines médiévales d’un espace qui s’est développé autour de l’activité des moulins de la Drize.
Ici, en 1729, on disait habiter «au Bordel». Le lieu-dit, donc. Il faut comprendre par là les traces étymologiques issues de la famille du même nom qui, depuis 1295, exploitait dans ce hameau non pas une maison close mais un moulin. Un toponyme qui faisait simplement référence à «des maisons de planches, de cabanes». L’activité meunière des bords de la Drize a structuré l’expansion du centre de Troinex, correspondant au hameau de la Grand-Cour.
Querelles de moulins
L’irrigation naturelle des terres troinésiennes, y compris l’étang apportant l’eau au moulin de la famille du Bordel, a fait de Troinex un véritable terroir: des terres cultivées en céréales, jardins, vignobles et de nombreux prés, laissant supposer aux historiens un élevage surtout ovin très développé. Passant de générations en générations dans cette même famille – qui détenait le monopole de la technicité meunière dans le secteur – le moulin connait des difficultés financières et autres querelles familiales au travers du XVème siècle. Ceci entraînera notamment un épisode de dépopulation. Le descendant Perceval du Bordel réussira toutefois à obtenir une modération des charges par le prieuré de l’époque et l’entourage pacifie les conflits. Il est intéressant de lire dans les pages de l’ouvrage Histoire de Troinex ces anecdotes de proximité, bien que les spécialistes du coin affirment avoir trouvé peu de traces de la vie des habitants à Troinex, à cette époque.
Au XVIème siècle, les hameaux sont constitués par les bâtiments de deux ou trois domaines. A Troinex, le domaine de Grand’Cour appartient alors à la famille Audéoud, qui fondera dans Genève plusieurs sociétés de commerce (épices, toileries). La Grand-Cour ne devient le centre du village de Troinex que dans la première moitié du XIXème siècle. En 1834, le Conseil municipal décide de construire une mairie. L’année suivante, peut-on lire dans Histoire de Troinex, «le Conseil représentatif de Genève adopte une loi sur l’instruction publique prévoyant l’obligation pour les communes de construire une école primaire». L’école ouvrira en 1838, avec assez peu de succès, certains habitants continuant d’envoyer leurs enfants à l’Ecole de Carouge.
La Grand’Cour moderne
L’historienne Catherine Santschi raconte en 1991 être allée parler aux anciens de Troinex pour chroniquer la vie à Grand-Cour au siècle dernier pour son ouvrage. A Grand’Cour, la vie «débordait d’activités, de bruits et d’odeurs» lui rapporte-t-on. Les petites gens cultivaient tous des jardins à l’arrière des bâtiments ; le blanchisseur se prenait de bec avec son voisin de la maison communale ; on entendait le bruit du métier à tisser (…) les Troinésiens venaient faire soigner leurs brûlures chez le guérisseur local (…) et le propriétaire du moulin, Louis Blandin, possédait toutes les vaches qui se trouvaient dans l’écurie proche de la maison communale…» C’est la disparition de la vie rurale à Troinex qui a profondément modifié son caractère.
Au 27, chemin de Grand’Cour, l’ancien moulin a été constamment transformé entre le XVIIème et la fin du XVIIIème siècle. Avis aux nostalgiques: sa meule tournante classée, la «rebatte», est visible dans le jardin.
SOURCES
- Histoire de Troinex, Association pour l’étude de l’histoire régionale, ouvrage collectif comprenant notamment les travaux de Catherine Santschi et David Hiler