Au parc de la Drize, il n’est pas rare d’apercevoir de gros tas de bois joncher le sol. Ce ne sont pas des oublis mais des abris pour les hérissons que fabrique Florian Emery, 32 ans, employé au service de la voirie et des espaces verts. Rencontre sur place pour parler de cette petite faune en hibernation, qui aura brillé par son absence.
Florian Emery, que gérez-vous exactement pour la Commune?
Avec mes deux collègues, nous nous répartissons les tâches de toute la gestion de la voirie et des espaces verts. à trois, on arrive à faire tourner le secteur. Je m’occupe personnellement plutôt de l’aménagement, de l’entretien et de la création de nouveaux espaces à partir de friches, par exemple. Je suis horticulteur de formation, j’ai plusieurs CFC. Je m’occupe aussi de tous les bacs à fleurs et nous avons aussi des serres pour fournir les giratoires. J’aime énormément ce travail varié, l’autonomie qu’il permet et surtout passer mon temps à l’extérieur.
Depuis combien de temps ce parc est-il aménagé?
Cela fait déjà six ans maintenant. La protection civile nous a aidé à l’époque, pendant plusieurs journées. Il y avait quarante mètres cubes de déchets à évacuer, c’était beaucoup de travail. Aujourd’hui, c’est un haut lieu de passage et de plaisance, les gens aiment venir y passer du temps pour pique-niquer. La semaine passée, par exemple, un arbre s’est écroulé et je l’ai découpé en petits morceaux, pour faire un nouvel abri à hérissons, comme vous pouvez en voir à plusieurs endroits du parc. C’est une manière de recycler ces déchets organiques sur le mode de la permaculture, donc en prenant exemple sur le fonctionnement de la forêt. Ainsi, toute l’énergie de la nature reste concentrée dans le parc.
Il y a beaucoup de hérissons qui vivent ici?
C’est certain, il y en a partout ou parfois simplement de passage. C’est pour cela qu’on fabrique des ouvertures dans les clôtures, pour qu’ils puissent passer sans entrave. Mais le hérisson est un mammifère nocturne, alors on n’en verra pas, ils sont en hibernation.
Quelles sont les règles pour leur créer un espace viable?
D’abord il faut conserver les prairies, les haies ou les ronciers. Plus c’est sauvage mieux c’est, en fin de compte. On fabrique des chemins praticables mais en laissant les bords en prairie. Ils doivent pouvoir se cacher. Ici, par exemple, j’ai réutilisé le bois pour faire leur refuge. Le principe, c’est qu’il rentre et se planque le plus loin possible pour hiberner. On fabrique une sorte de tunnel en décrochement et des cavités pour qu’il puisse se protéger des prédateurs.
A quel moment le hérisson entre-t-il en hibernation?
Il va s’abriter à partir de novembre, quand les températures baissent. Son rythme cardiaque va peu à peu ralentir. S’il ne faisait pas cela, il mourrait de faim, puisqu’il ne trouverait ni limaces, ni vers, fruits ou escargots. Ce sont des omnivores, en aucun cas des nuisibles, plutôt les meilleurs amis du jardinier! Ils vivent en moyenne deux ou trois ans, parfois jusqu’à dix ans. Mais il y a beaucoup de mortalité avec les routes, les prédateurs naturels et surtout les anti-limaces et autres pesticides. D’autant qu’ils font des kilomètres pour s’accoupler et chasser.
Ce parc hôtelier pour hérissons, comment le faire chez soi?
Il ne faudrait pas trop arranger le paysage. Dénaturer la forêt, c’est aller contre la vie. Avec les aménagements de territoire, les hérissons peinent de plus en plus à trouver des espaces pour eux, car on a tendance à nettoyer et tout mettre à la déchetterie. Il est crucial de maintenir des coins en friche au jardin, de ne pas tout jeter quand on coupe du bois ou quand on ramasse les feuilles. Il est surtout très important de ne pas les déranger à partir de l’automne, de tout laisser tel quel, car la perte de l’énergie dépensée pour se réveiller pourrait leur être fatale à la saison froide.
C’est le but des panneaux que l’on voit un peu partout?
Oui, ce parc a un objectif pédagogique. On cherche à sensibiliser les passants, à donner des exemples et parler du mode de vie des hérissons. Et ce petit logo hérisson, c’est la « Charte des jardins», que n’importe qui peut signer pour obtenir un écriteau pour l’entrée de sa propriété. Il atteste d’un engagement moral à protéger la biodiversité, dont la petite faune sauvage.
www.charte-des-jardins.ch