Grâce à la passion de Florence et de sa fille Océane, deux ânesses offrent à Troinex un bonheur partagé. C’est à quelques minutes du cœur du village, dans un champ au chemin de Roday que, Cheyenne et Cherokee charment les visiteurs petits et grands.
Florence et sa fille Océane avec leurs ânesses.«J’en ai toujours rêvé». Florence avait ce désir d’enfant qui, depuis l’âge de sept ans, ne l’a jamais quittée. C’est chez un éleveur d’Orbe qu’elle cherche son jeune âne. L’un d’eux se trouve à la buvette d’alpage de la Dent-de-Vaulion. «Le coup de foudre». C’est une ânesse. Elle se nommera Cheyenne. «C’était il y a une quinzaine d’années. Mon mari avait été nommé responsable de la Poste de Troinex, nous avions alors quitté la commune d’Onex. Le maraîcher Charles Matringe met à disposition notre premier terrain qu’il loue à la commune.» C’était comme prédestiné. Quatre ans plus tard, elle va prendre sous son aile Cherokee, jeune ânesse traumatisée par une première vente à un propriétaire indélicat et maltraitant. «Elle était traumatisée, elle avait peur des gens, de la longe et refusait le pansage», se souvient Océane qui nouera avec l’animal un rapport privilégié.
«Au départ, nous n’y connaissions rien», reconnaissent-elles. Elles se sont totalement investies. Elles apprennent les besoins de l’âne et ses exigences, les soins, sa nourriture, son comportement et son éducation avec Vadrouill’âne, association pour la protection et la promotion de l’âne en Haute-Savoie. Elles se perfectionnent avec des cours d’éthologie asine et de soins spécifiques tels qu’ils sont donnés à l’Académie britannique de l’âne (The Donkey Sanctuary), spécialiste consacré de la recherche, des soins et du conseil.
Florence et Cheyenne, une longue relation.Âne et cheval, pas toujours les mêmes idées
à Troinex, enfants, parents, personnes âgées découvrent avec émerveillement ces ânesses choyées, avec leur courte crinière dressée sur l’encolure et leurs sabots caractéristiques, plus petits que ceux d’un cheval. «Les animaux sont heureux de la visite. Ils sont très sociables, même la sensible Cherokee», relèvent les deux passionnées. Avec le projet d’habitations aux chemins Lullin/Dottrens, Cheyenne et Cherokee ont été transférées dans le champ du chemin de Roday, grâce à la Mairie. Les Troinésiens qui baladent leur chien aiment aussi ce parcours vers les équidés.
Compagnons de l’homme depuis les temps les plus anciens, ils traînent derrière eux une symbolique ambigüe. Têtus et bornés pour certains, ils sont pourtant intelligents, patients, contemplatifs et prudents. Autant d’attributs positifs qui se révèlent au quotidien. «En randonnée, si l’âne n’a pas envie de marcher, ce n’est pas par caprice, c’est qu’il estime qu’il y a un danger, un obstacle qu’il ne connaît pas, par exemple, et il préfère réfléchir avant de s’aventurer plus loin», explique Océane. Les âniers et les spécialistes du domaine équin l’affirment: le cheval est réputé pour son impétuosité, l’âne pour son calme. On ne s’adresse pas pareillement à un âne. «Avec l’âne, il faut être en perpétuelle négociation.» Risquer une relation de dominant et dominé est assurément la plus détestable des manières d’engager une relation. On y perdrait toute notion de complicité et de plaisir mutuel.»
Et ce n’est pas leur seule différence. «à l’inverse du cheval, les ânes ne sont pas des animaux de fuite. Ils ont un comportement territorial qu’ils savent défendre et gardent propre.» Capables de manger des chardons et des ronces sans broncher, ces herbivores peuvent souffrir facilement de colique (ralentissement ou arrêt du transit digestif) et de fourbure (congestion et inflammation des pieds), en raison d’un excès de nourriture. «On croit habituellement leur faire plaisir avec des carottes, mais elles doivent être consommées en quantité très raisonnable. Quant au pain, dont l’amidon se transforme en glucose au cours de la digestion, il est très nuisible pour leur santé.»


La fête des enfants
Océane est kinésiologue, mais aussi diplômée en communication animalière. Toute une histoire de ressentis et d’intuitions. «J’ai grandi entourée d’animaux. Mais c’est ma chienne qui a influencé mon orientation. Elle est avec moi depuis mes neuf ans. Cherokee, elle, a fait partie de ma vie d’adolescente.» Aujourd’hui, la jeune femme a partiellement quitté le toit familial. Avec les professions de l’une et de l’autre, les balades se sont raréfiées pour devenir le privilège de leur week-end. Une façon de jouer avec le temps, de le narguer amoureusement. Un hors-temps.
Cherokee et Cheyenne participent régulièrement au marché de Noël de Troinex. «C’est l’occasion pour les enfants de faire un petit tour sur leur dos. Ils sont ravis et nous remercient, mais c’est surtout les ânesses qu’il faut remercier, c’est ce que nous essayons de leur apprendre.» Les deux passionnées organisent également des moments dans le champ pour les enfants accompagnés de leurs parents. Les deux ânesses sont aussi les vedettes de jours d’anniversaire inoubliables. Quiz, figures de voltige sur le dos de l’animal à l’arrêt, enchantement et photos souvenirs… Un vrai bonheur.
Rendez-vous avec les ânes
Visites et animations d’anniversaires sur demande. Les visites sont organisées le mercredi et le week-end, à prévoir une semaine à l’avance.
Informations:
Florence
079 941 43 52
Hommage à Ficelle et Pelote
Les habitants du village se souviennent des deux brebis qui ont partagé la vie de Cherokee et Cheyenne durant plus de dix ans. Très affaiblie par de l’arthrose, Pelote devait être euthanasiée. C’était en août 2020. Toutes les quatre étaient à l’alpage comme chaque été. Le dernier matin, on a trouvé les brebis tuées par des loups. «Une sorte de pacte de solidarité tacite. Elles entretenaient toutes deux une relation si étroite qu’elles ont eu envie de partir ensemble», expliquent Florence et Océane.
