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Les gens qui font Troinex

Michel Baumgartner, un artiste qui peint le temps qui passe

Michel Baumgartner consacre sa vie à peindre les variations du temps sur le motif. Le Mont-Salève est sa muse. Rencontre in extremis dans un atelier condamné. 

Michel Baumgartner,  14ème personnage de notre série de portraits Les gens qui font Troinex.

Michel Baumgartner est peintre pleinariste. Il travaille sur le motif. En somme, il passe sa vie dehors, à traquer la lumière sur ses toiles au rythme des saisons. Vous pourriez facilement le croiser devant son chevalet au milieu d’un champ, à l’ancienne, en haut du «chemin du vieux tram», comme il aime à l’appeler. Car l’ancien transport public genevois se rendait autrefois jusque là, non loin de l’actuel chemin d’Evordes. C’est aussi depuis ce point de vue troinésien que dès 1888, Ferdinand Hodler peignait le Mont-Salève. Deux peintres éloignés de plus d’un siècle, les yeux rivés vers les mêmes cimes. On ne peut pas s’empêcher de penser au célèbre peintre suisse lorsqu’on regarde le travail de Michel Baumgartner. Le Salève est son protagoniste principal, connu sous presque toutes ses ombres et ses humeurs.

Cependant, ce n’est pas parmi les herbes hautes que l’on a rendez-vous avec le natif de Genève, mais dans les quelques mètres carrés de l’atelier où il accumule son travail depuis trente-trois ans. On le rencontre d’ailleurs un peu fébrile à l’idée de devoir quitter contre sa volonté ce lieu jonché d’histoire et de paysages en série où chaque oeuvre, chaque souvenir, est soigneusement rangé. Avec une érudition discrète, il nous ouvre ses tiroirs: il a préparé un itinéraire photographique généreux dans ses archives personnelles et artistiques. Il aime montrer, voyager dans un temps qu’il cherche continuellement à capturer.

Vie et mort des fleurs

«Regardez, là, c’est un iris; quand il se fane, c’est étonnant, il se rapproche en se penchant vers celui d’à côté qui à son tour s’éteindra, dans une sorte de baiser de la mort». L’attention minutieuse aux cycles, Michel Baumgartner l’immortalise sous forme de dessin botanique lorsqu’il n’est pas en train de peindre le paysage, à l’huile ou l’aquarelle. Et il ne le fait pas dans n’importe quel champ. Il existe un jardin dans lequel il se rend quotidiennement pour dessiner, avec ou sans élèves. «Je dois l’entretenir car j’ai orchestré tout un tournus pour qu’à chaque saison, de nouvelles fleurs éclosent, que je vais pouvoir suivre jusqu’à leur finitude.» Et ce jardin d’entrainement au crayon, il l’a défendu bec et ongles lorsqu’il était menacé de destruction. «J’y suis très attaché, c’est le jardin de mon enfance, où vivent et sont enterrés les chats que j’affectionne. J’y ai même vécu, témoin de toute une évolution.» Michel Baumgartner est amoureux des lieux qui comptent. 

Une vocation

«A 14 ans, je vendais mes dessins à l’école, des portraits à partir de photos des musiciens de l’époque, des Rolling Stones, mais j’ai commencé bien avant.» Michel naît en 1956 aux Eaux-Vives d’une mère allemande arrivée à Genève après la Seconde Guerre mondiale. Son père est un coiffeur d’origine suisse allemande. Il sensibilisera son fils à Hodler avant qu’un ami peintre atteste de ses dispositions à la peinture. La famille s’installe à Troinex en 1959. A dix-sept ans, Michel Baumgartner entre à l’Ecole des Arts Décoratifs de Genève. Craignant de ne pouvoir gagner sa vie comme peintre, il débute une carrière de graphiste, mais décide finalement de se consacrer à ses premières amours à partir d’un évènement déclencheur en 1996, à l’âge de quarante ans. Cette année là, Michel fait poser quarante personnes dans son atelier pour réaliser leur portrait, ce qui lui vaudra un article dans la Tribune de Genève. Mais ce sont les portraits des montagnes, de son Salève à lui, qui deviendront le cœur de son oeuvre. Michel Baumgartner rejoindra d’ailleurs la Guilde suisse des peintres de montagne en 2008.

Les saisons du Salève

«Le Salève est mon sujet favori. Je crois que c’est l’infini qui me plait. Ce n’est jamais le même dessin. Entre le soir, le matin, l’hiver ou l’été, tout change. Un peu comme Monet avec sa cathédrale de Rouen, je vais jouer avec toutes la palette des heures.» On apprend que «les bleus de mars sont toujours très intenses» et que le vent est son ennemi. Ainsi se dégagent des séries, comme celle des douze points de vue sur une année entière, que l’on peut retrouver dans sa publication de 2023, «mon Salève»: «Certains le voient comme une vilaine barre rocheuse, d’autres, comme moi, le trouvent visuellement intéressant» peut-on y lire.

L’artiste est un adepte de la transformation et de la concentration picturale du temps. «Ce qui est fascinant avec la peinture, c’est que je peux choisir de représenter une lumière idéale dans un même dessin, à mesure que les heures passent.» A l’écouter décrire avec passion le détail de chaque angle et de chaque secret révélé par le Salève, Michel Baumgartner semble loin d’avoir épuisé son engouement pour son sommet de prédilection, qu’il s’est amusé à peindre à grande vitesse durant deux mois d’un été pandémique, depuis le milieu du lac, sur les bateaux CGN. Mais il dessine aussi d’autres vallées, d’autres pitons. Le regard aiguisé, Michel Baumgartner est frappé d’années en années par les marques du dérèglement climatique. «Ici, on voit qu’il n’y a plus d’herbe, uniquement de la roche; la nature est délavée, elle est rappée par l’eau. Mon travail est aussi une manière de rendre compte de ce qui se passe.»

Entraîner l’oeil

Les lundis, Michel Baumgartner entraîne son geste aux nus dans des cours de dessin académique. Les jours de pluie, il se concentre sur les chats, ou bien va «croquer les gens au bistrot». «Le sportif, il fait comment? Comme un pianiste avec ses gammes, il doit entraîner son corps! C’est la même chose pour la peinture. Le regard, le geste, vous devez sans cesse le nourrir. Il suffit d’une semaine pour perdre de l’habileté et de la sûreté avec sa main.» L’artiste est aussi percussionniste, et, dans l’impossibilité d’avoir un lieu où utiliser sa batterie, il continue toutefois d’exercer son geste à la caisse claire, sur un pad. On parle peu de l’entraînement du muscle du regard. Mais on ne le trompera pas sur un paysage peint ou non d’après photo. Il voit les erreurs de lumière, de perspective et de profondeur. Et de répèter à ses élèves: «Ne regardez pas ce que vous faites, sinon vous ferez ce que vous savez». 

Michel Baumgartner sait de quoi il parle, lui qui est atteint d’un strabisme depuis l’enfance. En cherchant ses lunettes, il nous saluera par cette histoire de l’oeil dans le plus beau des paradoxes: «Physiquement, ma vue baisse en vieillissant, mais j’ai un oeil tellement entraîné avec l’expérience et le travail qu’artistiquement, c’est curieux, je vois de mieux en mieux!» 

Bio Express

1956

Naissance à Genève

1959

Arrivée à Troinex avec ses parents

1973-1979

étudie à l’Ecole des Arts Décoratifs de Genève

1980

Début de sa carrière de graphiste

1990

Obtient son atelier à Carouge

1996

Peint 40 portraits de ses amis en 2 mois, à l’occasion de ses 40 ans

1999

Devient membre de la Palette Carougeoise

2003

Premières peintures de montagne

2008

Devient membre de la Guilde suisse des peintres de montagne

2014

Devient membre de la Société Française d’Illustration Botanique

2018

Conférence sur Hodler dans le cadre du Fonds de décoration de Troinex

2022

Réalise une série d’aquarelles du Salève, depuis les bateaux CGN

2023

Publication du livre «mon Salève»


Prochaine exposition

Du 27/09 au 13/10 2024
«Immersion dans la nature»
fermerosset.ch


Avis de recherche

Michel Baumgartner est actuellement toujours à la recherche d’un atelier. 
Des idées ou contacts? 
graphicfauve@bluewin.ch


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